Normalisation des relations irano-saoudiennes du point de vue des experts du Conseil de l’Atlantique

8:27 - March 16, 2023
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Téhéran(IQNA)-Les analystes du Conseil de l'Atlantique (fondé en 1961), un groupe de réflexion américain situé à Washington D.C, dans le domaine des relations internationales, considèrent la normalisation des relations entre Téhéran et Riyad, comme positive pour la région.

Pour ces analystes, le rétablissement des relations entre les deux pays est l'annonce de progrès diplomatiques entre la République islamique d'Iran et le Royaume d'Arabie saoudite, avec la médiation de la Chine et une avancée importante dans la diplomatie régionale qui peut marquer une nouvelle étape au Moyen-Orient.

Guillaume F William F. Wechsler, directeur principal du Centre Rafiq Hariri et des programmes du Moyen-Orient au Conseil de l'Atlantique, a déclaré : « Le rétablissement des relations entre l'Iran et l'Arabie saoudite, annoncé le 10 mars 2023, a suscité diverses opinions et analyses. Certains ont salué cet accord et l'ont considéré comme une étape vers la réduction des tensions dans le monde islamique et la région de l'Asie occidentale, en particulier dans le cas de la guerre au Yémen. En revanche, certains autres analystes sont prudents et considèrent cet accord comme une étape importante mais insuffisante pour résoudre les problèmes fondamentaux de l'Asie occidentale et de Téhéran-Riyad.

Plusieurs analystes de l'Atlantic Council ont fait part de leurs opinions sur la normalisation des relations Téhéran-Riyad et ses conséquences.

L'accord « Ibrahim » négocié par les États-Unis, qui visait à établir des relations diplomatiques entre Israël et un certain nombre de pays arabes, dont les Émirats arabes unis et le Maroc, et à normaliser les relations entre l'Arabie saoudite et Israël, a échoué. Les États-Unis ont persisté dans leurs efforts pour atteindre cet objectif mais la crédibilité de Washington en tant que pacificateur dans la région, a été compromise, en raison de son manque de fiabilité et de sa tendance à prendre parti dans les conflits, au Yémen et en Syrie. En revanche, la Chine est perçue comme un médiateur plus souple et impartial.

Si cette tendance se poursuit, davantage d'acteurs régionaux pourraient se tourner vers la Chine en tant que médiateur plutôt que vers les États-Unis. Cette évolution est positive pour une région qui a besoin d'accroître la diplomatie et le dialogue entre ses rivaux traditionnels. L'Iran bénéficierait de plus de moyens pour annuler les sanctions américaines, tandis que l'Arabie saoudite pourrait récupérer les coûts de l’échec d’une éventuelle normalisation de ses relations avec Israël. La Chine, à son tour, connaitrait un développement de ses relations économiques et un environnement commercial plus sûr au Moyen-Orient.

L'évolution de la reprise des relations diplomatiques entre l'Arabie saoudite et l'Iran, n'est pas choquante en soi, car Riyad et Téhéran y travaillent depuis un certain temps, les Iraniens indiquant clairement qu'ils aimeraient que cela se produise. Le fait que ce cycle de négociations n'ait duré que quatre jours confirme l'idée d’une volonté de rétablir les relations.

Bien sûr, nous assisterons probablement à une nouvelle désescalade, mais le résultat global dépendra fortement de la manière dont les deux acteurs procéderont et s'ils sont disposés à donner suite à la normalisation de leurs relations.

De toute évidence, les deux poids lourds régionaux ont besoin de temps pour se concentrer sur d'autres priorités et défis nationaux et régionaux. Cependant, l'aspect le plus évident de cet accord est la présence de la Chine. L'empreinte de la Chine dans ce développement diplomatique, renforce l'idée que le rôle de la Chine dans le Golfe Persique et la région, se développe de manière significative, et dépasse les relations commerciales conventionnelles. Cet accord souligne également l'absence des États-Unis en tant qu'acteur majeur dans la région, sur les plans diplomatiques, économiques et militaires.

Compte tenu de l'accent mis par Washington sur la guerre de la Russie contre l'Ukraine, et de l'augmentation des tensions régionales causées par l'augmentation du niveau d'enrichissement nucléaire de l'Iran à 90 %, le rapprochement de l'Arabie saoudite et de l'Iran n'est pas nécessairement une mauvaise chose pour les États-Unis.

Cependant, ce développement devrait ouvrir les yeux de Washington sur deux choses :  Premièrement, les États-Unis ne devraient pas minimiser cette initiative et devraient accorder plus d'attention à ces développements compte tenu de leurs effets sur leurs intérêts et la région. Deuxièmement, cet accord donnera à la Chine une présence sensible dans la région. Jusqu'à présent, la Chine était le gagnant économique de cette région. Si la Chine renforce sa présence diplomatique et politique, cela signifie qu'elle deviendra dans l'avenir, un acteur de plus en plus important dans le domaine de la sécurité régionale.

Les intérêts américains dans le Golfe Persique sont plus sûrs si les pays du Golfe Persique travaillent activement à réduire les tensions. L’accord de sécurité de 2001 entre l'Arabie saoudite et l'Iran, avait permis d'éviter un conflit réel pendant 10 ans, malgré une profonde méfiance mutuelle, et il en est toujours ainsi aujourd'hui. Il convient donc de saluer la nouvelle du rétablissement des relations diplomatiques entre ces deux pays, après l'accord l'an dernier, entre les Émirats arabes unis et l'Iran, sur l'échange d'ambassadeurs.

عادی‌سازی روابط ایران و عربستان از نگاه کارشناسان شورای آتلانتیک

Cette fois, cependant, l'accord s'accompagne de deux mises en garde, dont chacune soulève des questions stratégiques importantes pour les États-Unis. La première et la plus évidente est que c'est la Chine qui a rapproché les deux parties, l'annonce coïncidant avec le début du troisième mandat de Xi Jinping. Après des années de déclarations de Pékin qui assurait vouloir simplement nouer des liens économiques au Moyen-Orient, la Chine n'a cessé d'accroître son influence politique régionale depuis deux décennies, comme l'ont récemment souligné la visite de Xi Jinping à Riyad en décembre, et la visite du président iranien, Ebrahim Raisi, à Pékin le mois dernier. Deuxièmement, l'annonce intervient alors que les États-Unis et Israël discutent étroitement des réponses possibles au programme nucléaire iranien en cours, avec des exercices militaires conjoints et la visite du conseiller à la sécurité nationale d'Israël, à la Maison blanche, avant le voyage du Premier ministre Benjamin Netanyahu en Europe.

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Alors que la Maison Blanche peut saluer cette désescalade, Tel-Aviv ne le fera pas, car cette décision sera interprétée comme une mesure visant à réduire la menace d'une action militaire contre l'Iran. Il ne serait pas étonnant que la prochaine annonce soit la reprise des pourparlers irano-américains sur le plan d'action global conjoint (JCPOA), avec la médiation de la Chine. Bien que je sois sceptique quant à la probabilité qu'un tel accord se concrétise dans les circonstances actuelles, une telle annonce serait la bienvenue à Washington, mais considérée en Israël, comme une réduction de la force de dissuasion américaine et israélienne, face à l'Iran ».

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