Selon les relations publiques de l'Organisation iranienne de la culture et de l'orientation islamique, hérité de traditions chiites introduites au XVIIIe siècle par des migrants d’origine persane et bengalie, le Tabut est devenu un phénomène culturel, social et religieux, enraciné dans le tissu local indonésien.
Le rituel débute dès le premier jour de Muharram et s’étend jusqu’au dixième, commémorant le martyr de l’Imam Hussein (as) à Karbala.
À Bengkulu, les habitants construisent de grandes structures symboliques appelées tabut — cercueils décoratifs fabriqués en bois, tissu et ornements — représentant ceux des martyrs de Karbala. Ces monuments colorés sont ornés de calligraphies arabes, de motifs traditionnels et de symboles religieux.
Leur fabrication rassemble toutes les générations : les enfants peignent, les jeunes sculptent, les anciens transmettent l’histoire.
Le dixième jour, jour de l’Achoura, les tabut sont portés en procession dans les rues au rythme des tambours dolla. Le cortège est accompagné de chants, de lamentations et de représentations artistiques, dans une ambiance à la fois spirituelle et festive.
À la fin, les tabut sont symboliquement brisés ou immergés dans la mer, signifiant la libération des âmes des martyrs vers l’au-delà.
En juillet 2025, le festival a pris une ampleur exceptionnelle. Le 5 juillet, des milliers de personnes ont afflué vers le littoral de Pantai Panjang à Bengkulu pour participer à la grande cérémonie nocturne.
À Pariaman, le Hoyak Tabuik a rassemblé plus de 200 000 personnes. La présence du ministre de la Culture, Fazli Zon, a souligné l’importance nationale de cet événement, autrefois local.
Le gouvernement indonésien soutient activement la valorisation du Tabut, le reconnaissant comme un élément du patrimoine culturel immatériel. Des projets de documentation, de muséification, de routes touristiques religieuses et même une candidature à l’UNESCO sont en cours.
Le but est de faire du Tabut un événement à rayonnement international, illustrant la richesse du patrimoine islamique indonésien.
Fait notable : bien que d’origine chiite, le rituel du Tabut est aujourd’hui principalement pratiqué par des sunnites, dans un esprit d’unité, de respect et de mémoire commune. Il symbolise une forme de dialogue interreligieux et une capacité unique d’intégration culturelle. Loin des tensions confessionnelles, il véhicule des valeurs universelles telles que la justice, le courage, le sacrifice et la solidarité.
Le Tabut n’est plus uniquement une cérémonie religieuse : c’est un pont entre foi et culture, un espace de mémoire vivante et un instrument puissant de cohésion sociale.
Il rappelle que la tragédie de Karbala, même à des milliers de kilomètres, continue d’inspirer, d’éduquer et de rassembler. En cela, Bengkulu et Pariaman deviennent, chaque Muharram, les gardiens d’un héritage universellement partagé.