Marc Owen Jones, professeur adjoint d'études sur l'Asie occidentale à l'Université Hamad bin Khalifa, a abordé la question des fausses informations sur les récentes tensions et les bombardements de Gaza, et a écrit : « Depuis l’occupation de la Palestine par Israël, la désinformation est souvent associée à une orientation anti-palestinienne et islamophobe. Cette désinformation est soutenue par les réseaux sociaux, notamment la Platform X d'Elon Musk. Mais l’un des éléments notables de la désinformation qui s’est emparée des médias sociaux depuis l’attaque du Hamas dans les territoires occupés le 7 octobre, est qu’une grande partie de ces informations sont produites ou diffusées par des comptes d’utilisateurs étrangers d’extrême droite hindous, en provenance de l’Inde.
Ces faux récits incluent l’enlèvement d’un bébé juif et la décapitation d’un jeune garçon à l’arrière d’un camion par le Hamas. Un tweet très populaire, partagé par des milliers de personnes, affirmait même que l’attaque du Hamas (Opération Tempête Al-Aqsa) était une opération psychologique menée par les États-Unis.
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BOOM, l'un des services de vérification les plus populaires en Inde, a trouvé plusieurs utilisateurs indiens sur la plateforme X, à la tête de cette campagne de désinformation. Selon BOOM, ces influenceurs qui partagent régulièrement des informations erronées, ciblent principalement la Palestine ou soutiennent Israël.
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Par exemple, un compte a commencé à diffuser une vidéo affirmant que des dizaines de jeunes filles avaient été prises comme esclaves par un militant palestinien. Cette vidéo provient probablement d’un voyage scolaire à Jérusalem. La vidéo est plutôt de mauvaise qualité, mais si vous regardez attentivement, vous pouvez voir les filles discuter joyeusement et utiliser leur téléphone portable. Cependant, cette vidéo a été retweetée des milliers de fois et a été vue au moins 6 millions de fois. La vidéo a même été partagée sur la chaîne Telegram Angry Saffron, une chaîne d'information opérant depuis l'Inde.
Une analyse des comptes de partage de vidéos a révélé que la plupart d'entre eux sont basés en Inde.
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Dans un autre exemple, une vidéo a été diffusée affirmant faussement que le Hamas avait kidnappé un bébé juif. Cette vidéo a été vue plus d'un million de fois. Sept des dix tweets les plus partagés provenaient de comptes basés en Inde, ou contenant le drapeau indien dans leur biographie.
Ces tweets ont reçu à eux seuls, plus de 3 millions de vues sur X. Cependant, la vidéo date de septembre et n’a rien à voir avec les événements de Gaza.
Parmi ces fausses vidéos, le compte de Mr. Sinha, qui partageait une fausse vidéo d'un garçon décapité par le Hamas, incluait l’hashtag #IslamIsTheProblem dans le même message.
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D’autres tweets ont été plus ouverts et plus directs dans leur haine de la Palestine. Un compte indien prétendant appartenir à un soldat indien à la retraite, disait : « Israël doit en finir avec la Palestine sur cette planète ».
Ce n’est un secret pour personne que l’Inde connaît un problème d’islamophobie, un problème qui s’est aggravé depuis l’arrivée au pouvoir du Premier ministre Narendra Modi et de son parti, le Bharatiya Janata Party (BJP).
Un rapport du Conseil islamique de Victoria, basé en Australie, a montré que la plupart des tweets islamophobes proviennent de l'Inde. Dans son livre « I Am a Troll », Swati Chaturvedi parle de l'armée des médias sociaux en ligne du BJP. Selon Sadhavi Khosla, l'une des personnes interrogées par Chaturverdi : « Le BJP dispose d'un réseau de bénévoles qui reçoit des instructions de la cellule des médias sociaux et de deux organisations affiliées, pour troller dans les sites internet ». Il a déclaré qu’il avait quitté la cellule informatique après en avoir eu assez de devoir constamment propager la misogynie, l’islamophobie et la haine.
Si la cellule informatique du BJP peut promouvoir l'islamophobie, elle agit également dans la diffusion de fausses informations et joue un rôle dans le conflit à Gaza.
Pratik Sinha, co-fondateur et rédacteur en chef du site indien de vérification des faits, à but non lucratif « AltNews », a tweeté : « Étant donné la désinformation dans les grands médias indiens et sur les réseaux sociaux, pour soutenir les exportations israéliennes, nous espérons que le monde réalisera comment l'aile droite de l'Inde a fait de ce pays, la capitale mondiale de la désinformation.
L'achat de Twitter par Elon Musk (rebaptisé X) et sa décision de réduire ses efforts pour empêcher la propagation de mensonges sur la plateforme, ont potentiellement ouvert la voie à d'autres géants de la technologie, pour emboîter le pas dans la gestion des contenus préjudiciables. Des entreprises comme Meta et YouTube semblent revoir leurs engagements visant à réduire les discours de haine, la désinformation et d’autres contenus préjudiciables sur leurs plateformes.
La semaine dernière, l’Union européenne a lancé un avertissement à Musk, suite à un déluge de désinformation sur la Plateforme X, après l’attaque du Hamas dans les territoires occupés.
Le soutien occidental à Israël, et l’indifférence des géants de la technologie, à modérer le contenu des comptes islamophobes de droite sur l’Inde, ont transformé la crise de Gaza en un tremplin pour attiser la haine contre les Palestiniens et les musulmans.